Si vous aussi, après avoir regardé Le Jeu de La Reine (The Queen’s Gambit en anglais), vous pensez être un professionnel en devenir des échecs, alors l’annonce de Google que les responsive search ads, ou RSA, sont maintenant le format par défaut des annonces dans Google Ads vous rappellera peut-être une tactique particulière des échecs : la manœuvre de louvoiement.
Une manœuvre de louvoiement est une manœuvre positionnelle où on utilise successivement différentes tactiques de manière détournée ou à distance, à l’opposé du jeu d’attaque direct. À l’heure actuelle, la manœuvre de Google faisant des RSA le nouveau format d’annonces par défaut n’impacte que l’IU, où Google offrira aux annonceurs de créer une RSA plutôt qu’une ETA (Expanded Text Ad) lorsqu’ils commencent à bâtir un groupe d’annonces. Les ETA peuvent toujours être créées et donc les RSA peuvent être ignorées.
Si rien ne semble changer à la surface, c’est parce que les manœuvre de louvoiement sont faites pour améliorer la position d’un joueur de manière progressive, pour faciliter la construction d’une attaque et la rendre plus efficace. Si vous me le permettez, j’aimerais continuer à analyser les changements de Google en gardant un œil sur ce qui pourrait être son objectif final.
L’ouverture aux échecs comprend la phase de début du jeu, quand chaque joueur cherche à avancer ses pièces de manière avantageuse pour la suite. Les annonceurs et Google bataillent depuis des années pour obtenir l’avantage.
Google a lancé les campagnes optimisées en 2013, retirant les campagnes spécifiques par appareil mais en ajoutant la possibilité d’enchérir en se basant sur des signaux contextuels tels que l’emplacement ou l’appareil. Si on continue avec l’analogie sur les échecs, c’était un mouvement e2-e4, une ouverture classique et très forte.
À partir de là, Google a ajouté des stratégies d’enchères à sa plateforme, en ajoutant un emplacement supplémentaire pour les annonces au-dessus des réponses organiques, en créant Dynamic Search Ads (les annonces de recherches dynamiques), en retirant les rapports et les enchères sur la position moyenne, en ajoutant des fiches de magasinage basées sur le flux, en élargissant les annonces textes, en introduisant les scores d’optimisation, en menant une mise à jour récente des types de correspondances, en retirant les requêtes de longue traîne des SQR, en ajoutant des extensions pour les emplacements automatisées et bien sûr, en dévoilant les Responsive Search Ads.
Pour chaque automatisation qui leur faisait perdre un peu plus de contrôle, les annonceurs ont trouvé des ripostes telles que le cheminement négatif, les campagnes spécifiques à des emplacements et même la façon dont ils utilisaient les mots clés avec modificateur de requête large. Tout cela formait une série de développements qui nous faisait penser que nous avions une chance de gagner, ou du moins tenir jusqu’à la fin du jeu.
Que vient faire l’annonce de Google dans tout ça? Google a joué un coup qui ne change rien à la capacité des annonceurs à gérer leurs campagnes sur le réseau de recherche. Les enchères manuelles n’ont pas été retirées, contrairement à ce que Microsoft a annoncé la semaine passée. Les mots clés n’ont pas non plus été remplacés par des catégories ou des audiences. Alors qu’est-ce que le géant de la recherche a fait, finalement? Il a rendu ses prochains coups plus faciles à exécuter.
Les annonceurs numériques font souvent face à un paradoxe : l’automatisation et l’apprentissage machine sont les seuls moyens de survivre dans une industrie dont la complexité ne cesse de s’accroitre, et bien que les stratégistes et les tacticiens encensent la technologie et les opportunités qu’elle apporte, ils déplorent aussi la perte d’influence humaine. Les avancées de Google en matière d’automatisation ont sans aucun doute rendu la gestion de campagnes de référencement payant plus facile à exécuter de manière générale, mais aussi plus difficile à bien exécuter à cause de leur complexité.
Crédit: LUMA
Les intentions de Google se sont révélées au grand jour quand l’entreprise a retiré le mot ‘’word’’ de Google AdWords. Les campagnes de référencement payant seront éventuellement entièrement construites, achetées et optimisées en fonction des intentions de l’utilisateur et les expressions cherchées ne seront qu’une entrée plutôt qu’une finalité.
Le fait de faire les RSA le nouveau type d’annonce par défaut va sans doute augmenter leur usage, surtout parmi les plus petits annonceurs. Ce changement va commencer à éroder l’augmentation des clics et conversion de 5% à 15% des RSA dont Google se flattait par rapport aux ETA à mesure que davantage d’annonceurs utilisent des textes d’annonces qui s’adaptent à chaque enchère.
En guise de solution, Google va encourager l’utilisation des mots clés à correspondance vague avec une stratégie d’enchère intelligente, ce qui est tout proche des enchères sur les catégories et éventuellement, sur les étapes du parcours du consommateur. Voici la fin du jeu selon Google, quand chaque campagne de référencement payant sera toujours présentée aux clients potentiels, ce quel que soit leur utilisation actuelle du moteur de recherche.
C’est peut-être une exagération que d’envisager un SERP où les deux premières positions répondent à la recherche actuelle alors que les positions trois et quatre servent à diffuser des annonces dans la catégorie où l’utilisateur est le plus proche d’une conversion, mais cela ajoutera de la concurrence à chaque position, ce qui va bien avec ce que Google a fait jusque-là. Ce sentiment d’apoplexie quand on analyse une partie d’échecs terminée et qu’on se demande comment il est possible qu’on ait pu ne pas voir venir ce coup est essentiel pour s’améliorer, même s’il n’est pas des plus agréables sur le moment.
Pour être clair, changer le type d’annonce par défaut ne va pas nous projeter immédiatement dans le futur prédit ci-dessus, mais c’est l’objectif d’une manœuvre de louvoiement. Bien que ce futur pourrait encore être lointain (ou peut être pas si lointain que ça…), ce geste de Google nous montre que son objectif final prend forme. Les annonceurs feraient bien de commencer à réfléchir à leurs ripostes.