Les smartphones ressemblent beaucoup à la carpe asiatique. La carpe asiatique a été introduite innocemment en Amérique du Nord dans les années 1960 afin de contrôler la forte expansion des algues et des populations d’escargots. Cependant, ce poisson est rapidement devenu l’une des espèces les plus envahissantes, décimant la végétation et détruisant les habitats d’innombrables espèces dans toutes les voies fluviales nord-américaines.
Alors pourquoi les smartphones peuvent-ils être comparés à cette espèce de poisson ?
Cette histoire débute aussi innocemment. Il y a dix ans, je me souviens très bien avoir été stupéfait en me rendant dans un Apple Store et en tenant dans mes mains pour la première fois un iPhone. Nous avons tous souhaité obtenir cette nouvelle merveille technologique agrémentée d’applications installées depuis l’App Store telles que le Sabre Laser, la lampe torche ou encore l’application iBeer (proposant une bière virtuelle à boire avec des amis !)
Dix ans plus tard, les smartphones sont quasiment devenus une extension de la main pour toutes celles et ceux âgés de 12 ans et plus. Ils jouent en effet désormais une part importante de notre vie et « disruptent » notre travail, nos amitiés, nos relations amoureuses, le commerce, le transport, etc.
Les smartphones sont omniprésents. Mais cette omniprésence peut se révéler être une qualité dangereuse car il nous est difficile de remarquer quelque chose qui est partout. Cette ignorance peut générer des effets insidieux. Une invasion silencieuse peut littéralement se produire sous nos yeux sans que personne ne la remarque.
Derrière leur confort indéniable d’utilisation, les smartphones ont donné naissance en l’espace de dix ans à un service pouvant perturber discrètement nos habitudes, nos réflexions, nos relations, notre sommeil, notre capacité d’attention, nos idées politiques, notre vie privée et notre confiance – et l’inquiétude croissance associée à cette technologie invasive devient impossible à ignorer.
En 2108, ce sujet a enfin émergé au sein du discours public. Les fabricants de smartphones proposent désormais des tableaux de bord pour nous aider à reprendre le contrôle et surveiller notre utilisation. Les parents peuvent limiter le temps d’utilisation des smartphones par leurs enfants et énormément de personnes suppriment les applications des réseaux sociaux de leurs téléphones. En 2018, nous pourrions très bien avoir atteint le « pic » en termes d’usage de smartphones.
2019 sera une année déterminante pour les smartphones. Beaucoup d’entre nous comprendront qu’il leur faut réduire leur temps d’utilisation ce qui représente une avancée importante. Des habitudes plus saines vont ainsi être adoptées, mais que cela signifie pour les responsables/directeurs digitaux ?
Vous avez probablement vu rapidement défiler ou lu des articles sur les réseaux sociaux, vous encourageant à diner sans votre smartphone, à désactiver les notifications voire à vous « désintoxiquer » numériquement parlant. Une inquiétude grandit au sein du grand public.
Selon une enquête menée par Pew Research, 42% des utilisateurs de Facebook âgés de 18 à 54 ans ont déclaré avoir arrêté de consulter le réseau social depuis plusieurs semaines ou plus. 26% déclaraient avoir supprimé l’application de leur smartphone.
Les parents soucieux des effets qu’ont ces appareils sur le cerveau des plus jeunes peuvent en conséquence revoir leurs habitudes. La “Technoference” qui peut être traduit par « interférence de la technologie » est le terme utilisé par les psychologues afin de décrire les effets négatifs qu’ont les appareils mobiles sur les relations familiales et sur le comportement des enfants.
Le fait d’admettre que vous avez une addiction aux smartphone est le principal indicateur d’une réduction du temps passé devant un écran. Alors, lorsqu’une étude récente indique que 40% des mères et 32% des pères admettent avoir une sorte d’addiction aux téléphones, un changement important dans les comportements se profile à l’horizon.
Associons cela à ce que nous avons récemment appris lors d’une conférence organisée par Adobe : Nous nous attendons à ce que les millenials dépassent les baby-boomers et deviennent les plus gros acheteurs en ligne dès l’année prochaine. Conscients de leur exposition aux écrans, les Millenials grandissent et représentent ainsi une part importante de la population.
Les responsables Data souffrent souvent du syndrome du rétroviseur. Ils limitent leurs analyses à l’historique des données clients. Faites-nous confiance, il s’agit d’une méthode quelque peu hasardeuse car les clients tout comme les plateformes media évoluent très rapidement. Si Facebook et Instagram sont chahutés, alors, mettre tous ces œufs dans ce même panier social pourrait ne pas être la meilleure des décisions, peu importe les résultats de l’année passée.
Désolé pour cette courte interruption mais une question économique peut être posée. Un produit ou un service proposé dans une quantité réduite ou limitée, connaissant une forte demande, verra-t-il son prix augmenter ou diminuer ? Une réponse… quelqu’un ?
Prix élevé. En effet, la loi de l’offre et de la demande indique qu’une diminution du temps passé sur Instagram implique une diminution de l’inventaire publicitaire et en conséquence une hausse des tarifs due à une concurrence accrue entre les annonceurs. Difficile de trouver un argument contre ce constat.
Mais attention, plus les prix augmentent, plus il est commun de voir des slogans tels que « Gagnez en efficacité », « Optimisez », « Personnalisez le contenu », « Segmentez », « Ajoutez de l’intelligence artificielle » !
Certes, les individus conscients de leur utilisation des écrans peuvent faire augmenter les coûts, ce qui peut déplaire, mais il est déplacé de penser que cette attention peut de nouveau être capturée à l’aide d’un autre media ou par un une économie de la surveillance.
Nous ne pourrons pas trouver de solutions en fouillant dans les données du passé ou en superposant diverses technologies publicitaires. Les individus soucieux de leur utilisation de solutions digitales sont partiellement immunisés contre les nombreuses astuces déployées et les poursuivre reviendrait à les rendre encore plus hostiles. En outre, ne chercher pas à les forcer à rester alors qu’ils souhaitent partir, cela serait tout à fait égoïste. Ayons une approche plus moderne, plus humaine.
Le premier élément à redéfinir concerne nos attentes en matière de performance pour 2019. Un ralentissement est inévitable, du moins pour certains segments de population. Nous devons consacrer la puissance des analyses afin de quantifier ce ralentissement, d’ajuster nos modèles de prévision et ainsi augmenter les capacités des leviers marketing.
Ce risque de ralentissement des performances ouvre la voie à des expérimentations d’ordre plus éthique. Comme l’a déclaré Craig Davis, ancien responsable de la création chez J. Walter Thompson, « Nous devons cesser d’interrompre ce qui intéresse les gens et devenir ce qui les intéresse ». Le marketing digital peut si souvent être focalisé sur le ROAS (Return On Ad Spend) qu’il en oublie d’investir patiemment dans des ressources permettant de construire sur le long terme des relations solides, stables et croissantes avec son audience.
Le récent livre de Lazar Dzamic et Justin Kirby sur contenu marketing stratégique décrit très bien le cadre permettant de résoudre ce problème. Les auteurs suggèrent que les efforts marketing réussis répondent à deux objectifs simultanés : l’intention d’utilité et la résonance émotionnelle. L’intention d’utilité qui permet de mesurer la capacité d’une marque à communiquer un contenu utile, orienté sur les réponses, devrait permettre d’aller plus loin que les habituels « Call to action » et recherches de mots clés. La résonance émotionnelle connecte un consommateur à un niveau personnel, permettant de gagner en valeur grâce à une contenu intéressant, donc recherché et partagé.
Mais ce type de marketing ne doit pas forcément être long à mettre en place. Les auteurs suggèrent que le contenu émotionnellement pertinent ne doit pas être nécessairement long et coûteux, pas plus qu’un contenu utile doit être ennuyeux. En constituant une équipe diversifiée, comprenant des experts de la donnée, des concepteurs UX, des account planners et des talents créatifs, nous pouvons progressivement faire face non seulement à la tempête qui s’annonce mais également à l’avenir digital.
C’est une expérience dans laquelle il faut investir. Il s’agit d’une approche centrée sur l’humain. C’est fascinant et inspirant car cela permet d’évoluer sans pour autant abandonner nos habitudes de vie.
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